Julie Boileau

La forêt regardée I et II

Le regard n’est pas l’effleurement. C’est le pemier acte, la découverte, c’est reconnaître, comprendre, aimer. Ce n’est pas voir, ça engage. Un regard peut être vague, se libérant même de la réalité ; ou furtif et répété, signe d’une angoisse ou timidité d’un premier contact. Véritable discours, il peut être soutenu et envoûtant.
Puis, il y a celui qui s’accroche à la nature et à sa beauté et qui fait du bien. Car regarder est un premier lien au vivant et à l’altérité. L’extérieur devient un morceau de soi.

Devenir forêt c'est inverser le corps. Le végétal comme mesure de soi. Entrer dehors.


Certains textes et/ou légendes sont des extraits du recueil Dehors qui accompagne les images.

La forêt regardée, 2017-2019, Amazonie et Plateau des Guyanes
Photographies argentiques moyen format numérisées, numériques, dessins et textes.

Les hommes ne manquent à personne

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relié à la lune

Voir loin

N'oublie pas de respirer

Le temps et l’atome ont les mêmes racines
et l’insécable roi
plonge dans l’humus des forêts immortelles

annoncer sans bruit
l’existence d’or

cercle dehors

Toutes les couleurs naissent du vert

L’arbre qui nous suit
tu l’as vu et as ri
il est fin comme un oiseau
il nous guide dans la forêt millénaire
seul rescapé des arbres à pattes
curieux de notre promenade
et de tes rires étonnés
L’arbre qui nous suit nous suit

A trois on se retourne

La mort est une vue de l'esprit

Toute bataille sera perdue
jusqu’aux retrouvailles
de l’oiseau tropical

Un arbre seul ne veut pas se faire photographier

l’image laisse les yeux choisir

C’est à toi qu’il faut dire bonjour en entrant
tu souffleras aux autres l’entrée d’un être
seul

impossible seul

Une fois qui a peur de se perdre
et celle qui voudrait l’écrire

Une fois qui aime la forêt
et celle qui pense l’avoir déjà perdue

Entends-tu les cris de résistance
autant de gens qui veulent sauver des simples
au loin

les yeux dans la terre

La rivière rejoint-elle les hommes en colère ?

Cher Wapa,

J’ai gardé les images
difficile de savoir
pourquoi un arbre

j’ai des questions

Tu vois et écoutes
tu excites les colibris

J’avoue je t’aime

Un tout naturel
est la politesse divine

Tu pleures car tu n’as pas regardé

hors-de-soi

rendre l’absence de l’homme
pour qu’il existe

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